Equinoxe d'automne

Du latin aequa nox (la nuit égale [le jour]), les équinoxes (20 ou 21 mars ; 22 ou 23 septembre) sont les seuls moments de l'année où la durée de la nuit égale celle du jour (12 heures) en tout point de la surface terrestre. À l'inverse de ceux qui, sous nos latitudes, regrettent avec nostalgie que l'été les quitte, j'apprécie ce moment où la fraîcheur s'en vient décourager les désirs de vagabongages, ce moment où la canopée, après s'être consumée en un feu sec de feuillages blonds, roux ou bruns, se dénude peu à peu — et qu'accompagnent avec quelque retard les autres étages de la végétation — jusqu'à laisser les troncs et les branchages affronter seuls les rigueurs du temps, ce moment, enfin, qui annonce la nuit qui s'allonge. J'aime aussi cette trajectoire qui conduit inexorablement à l'hiver. Plus généralement, je trouve dans le rythme particulier de nos quatre saisons, qui résulte de notre position à égale distance du pôle et de l'équateur et de la géométrie des mouvements de notre planète (sa rotation sur l'axe des pôles, sa révolution autour du soleil), des repères apaisants. Il me signale un équilibre vers lequel tendre. En même temps, plus qu'il ne donne l'impression d'un éternel recommencement, il me rappelle que le temple de la nature est toujours à reconstruire. Bientôt, le silence des nuits longues accompagnera mes travaux, mes lectures et mes écoutes musicales… La nuit confère aux sons une distinction plus nette, aiguise mon regard et semble accroître mes facultés de discernement ; c'est peut-être pour cela que je la préfère au jour. J'aime enfin l’automne pour l’atmosphère qui s’humidifie, le vent qui prend force, le jour qui décline jusqu’à se faire si court, si humble, parce qu'ils me ramènent inévitablement au logis. Ils sont comme autant d'invites au repli, au travail sur et chez soi ; à l’écriture aussi. Et quand arrivera l'hiver, je me ferai Héphaïstos, le dieu des arts du feu et des métaux, travaillant dans mes enfers à améliorer les outils de ma connaissance et à entretenir la lumière rassurante de la vie.