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Le journal d'Herminien
24 octobre 2005

La faucheuse

J'ai toujours eu un rapport étroit et ambigu avec la mort. Soit elle me hante comme un appel lancinant à vivre du mieux possible, soit je la désapprouve totalement, au même titre que je n'ai pas demandé à naître. Elle est comme une voix qui chuchote à mes oreilles, depuis ma tendre enfance : "viens, je suis là, je t'attends". Tant que je ne l'avais pas personnellement frôlée de très près, ce qui arriva à trois reprises au cours de ma vie (la faucheuse, finalement, dut remballer ses outils), je souffais de la mort des proches. Depuis, je ne supporte plus la mort de ceux qui me sont chers. Je n'ai pu me rendre à un enterrement depuis celui de mon grand-père paternel, en 1974 !!! J'ai assisté à des cérémonies, au temple, à l'église... Mais jamais je ne suis allé jusqu'à rester pendant une crémation ou une mise en bière... Comme si c'était une injustice que je ne sois pas parti avant ceux ou celles-là, dont je ne pouvais imaginer qu'ils s'en aillent avant moi. Et j'essaie d'inventer mes propres Ars Moriendi. Mais, surtout, je me souviendrai toujours de cette sensation du moment dernier, vécue trois fois. Une respiration qui s'arrêtait sur une expiration plus profonde, plus aboutie que les autres, une éjection d'air qui, en créant le vide à l'intérieur de moi-même, me faisait prendre conscience qu'une fusion s'opérait entre l'être et le néant. On eût dit que se formait, à une vitesse vertigieuse, un entonnoir au col tourné vers le bas de moi-même, où venait se dissoudre ma vie terrestre, et à partir duquel se réalisait, par une alchimie incompréhensible, une sublimation qui me transformait en un souffle aérien ressortant de mon corps par une ascention en spirale, puis flottant au-dessus de mon propre corps. Légèreté et vitesse mêlées...
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